"Le prince coquelicot-autisme"
"Je suis un petit prince"
Le Prince Coquelicot: Présentation et extraits.
Si l'autisme m'était conté / au-delà des transparences ( extrait )
- Par MEYER Margaux
- Le 20/04/2013
Un second livre...
Un peu comme un deuxième enfant, nous en rêvions.
Pour cet ouvrage, j'ai choisi de faire bande à part et de m'y atteler seul, d'en rédiger chaque ligne "au nom du père" afin de plaider la cause des hommes qui sont souvent les grands oubliés de la thématique autistique, ramenés la plupart du temps au rôle de simples géniteurs. Fréquemment absents de la scène médiatique ou en tout cas, en arrière plan ou vaguement évoqués dans les nombreuses émissions ou reportages dont le petit écran se montre si friand.
Sans vouloir porter ombrage aux mamans ni nuire à leur lutte légitime pour se débarrasser de cette étiquette de mère pathogène qu'on leur a collée dans le dos depuis des décennies, je revendique mon statut de père responsable et efficient, impliqué dans l'éducation de ses enfants comme dans la quête de solutions d'avenir.
Car non, nous n'avons pas tous quitté le navire à l'annonce du cataclysme qui allait s'abattre sur notre vie et certains d'entre nous ont même tenu fermement la barre en dépit des coups bas et des accusations portées par une certaine caste psychanalytique.
Et ça n'est pas parce que nous sommes moins impliqués dans l'intendance du quotidien, moins physiquement présents au foyer parce que c'est beaucoup nous qui continuons à travailler à l'extérieur que nous en devenons pour autant des pères transparents, démissionnaires ou absents.
Moi aussi, je ressens les choses, je souffre journellement, culpabilise parfois et m'interroge un peu, beaucoup, à la folie, passionnément... Moi aussi, j'ai fait le sacrifice de bien des rêveset de certaines réalités et moi aussi, j'aime viscéralement ce fils singulier, ne voulant pour lui que le meilleur.
ça, je tenais vraiment à le dire, même si celà ne fera jamais la "Une" d'aucun journal télévisé.
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Le bruit est très certainement une des choses qui m'est le plus difficile à supporter, à égalité avec la lumière en pleine poire au réveil.
Avec toi, je suis servi, tu illumines chacune des pièces que tu traverses sans jamais rien éteindre - et bonjour les économies d'énergie ! - et tu es tout bonnement cataclysmique dans la plupart de tes faits et gestes. Tu te déplaces dans la maison comme un cheptel, tu manges comme un goret dans un festival de bruits de bouche insupportables, tu cries pour un oui ou pour un non, tu grinces des dents, tu claques les portes, tu fais semblant de pleurer... tu adores les Bee Gees , bref tu es une agression permanente des tympans et des nerfs.
Malgré tout, tu es mon fils adoré et je t'aime tel que tu es... sans nier que j'aurais préféré que tu sois autrement, et tu me manques aussitôt que tu n'es pas là, même si je bénis le calme environnant et les heures de ménage en moins après les repas. Le soir, je guette le retour de ton taxi alors que je sais pertinemment que ton arrivée sonnera le glas... NON !... pas le glas !... je voulais dire la fin, l'arrêt, l'achèvement de ma tranquillité.
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Promenade dominicale par un doux après-midi de printemps.
Nous sommes seuls au monde, marchant "en amoureux" parmi les passants qui circulent sur le trottoir. Je ne vois personne, toi non plus, nous évoluons en mode "bulle", chacun livré à ses pensées. Je réfléchis à mon bouquin, je suis avec toi par citations interposées et toi, tu avances sous mon aile protectrice, encapuchonné jusqu'aux yeux.
Nous affrontons des regards beaucoup moins bienveillants qu'auparavant, du temps où tu étais un petit garçon aux mimiques rigolotes. A présent, tu es aussi grand que moi et les gens se demandent vraiment à quoi ils ont affaire.
En guise de réponse, tu t'échappes soudain pour aller tambouriner sur un poteau de signalisation, faisant résonner le bruit métallique dans toute la rue.
Ce concert se prolonge quelques minutes puis tu cours récupérer ta place sous mon bras...