"Le prince coquelicot-autisme"
"Je suis un petit prince"
Le Prince Coquelicot: Présentation et extraits.
Autisme : Qu'est-ce que c'est ?
- Par MEYER Margaux
- Le 31/08/2008
Les classifications
Le DSW (classification américaine des troubles psychiatriques, évolue en fonction des moeurs et des progrès de la science) influence le CIM (Classification Internationale des Maladies). Aujourd'hui l'autisme n'est plus une sous-catégorie au sein des TED (Troubles Envahissants du Développement). Désormais, il y a la catégorie TSA ( Troubles du Spectre Autistique ) qui englobe les autismes, le syndrome Asperger (ou autisme "pur" sans déficit cognitif) et les TED atypiques et, au sein de laquelle il faut bien respecter les spécificités de chaque groupe, les différences ne s'arrêtant pas uniquement à l'intensité (sévère, moyenne, légère). L'éventail de la gravité et des spécificités est très large, ce qui complique le diagnostic et la prise en charge.
Les personnes à risque (sex ratio, statistiques, continuum familial)
L'autisme toucherait 10 à 20 personnes sur 10 000 mais si on prend en compte l'ensemble des TSA, on arriverait à 60 personnes sur 10 000. Le syndrome d'Asperger (le plus médiatisé, Rain Man, Temple Grandin, Ludwig von Beethoven... parait-il...) concernerait 2 à 3 personnes sur 10 000. Il ne s'agit que d'estimations car il n'existe pas encore d'études épidémiologiques. En France, il y a peu de données. Le chiffre élémentaire, à savoir le nombre de personnes avec autisme, va du simple au double : entre 250 000 et 600 000 (8 000 naissances par an, 1 nouveau né sur 150). C'est sans doute un des blocages du 3e Plan-Autisme qui ne parvient pas à chiffrer les vrais besoins ni à fixer un calendrier fiable.
60 à 70% des autistes ne seraient pas diagnostiqués... Comment, dans ces conditions, construire une politique digne de ce nom ?
L'autisme touche 4 à 5 garçons pour 1 fille et on le retrouve dans toutes les catégories de population. La durée moyenne de vie est de 65 ans. La piste génétique se confirme. Ainsi, le risque d'autisme est 50 à 100 fois plus élevé en cas d'antécédents familiaux ou de gémellité.
Les bases du diagnostic
1 - La triade autistique
L'autisme est un trouble envahissant du développement qui se caractérise par des symptomes dans 3 domaines : difficultés à établir des interactions sociales (pas d'instinct social) / problèmes de communication verbale et non verbale (pas d'intention communicative innée) / manque d'imagination. Les personnes avec autisme doivent apprendre à comprendre de manière "scientifique" ce que les autres comprennent déjà de manière instinctive.
2 - La philosophie de l'iceberg
L'autisme est accompagné de comportements répétitifs et stéréotypés (souvent spectaculaires, dérangeants voire inacceptables) qui sont la partie émergée de l'iceberg. Le risque est de ne percevoir que ce qui se voit le plus et d'ignorer la partie immergée de l'iceberg : l'autisme se vit de l'intérieur !
3 - La nécessité d'évaluations régulières, adaptées, aidant à comprendre le fonctionnement de la personne et à fixer des attentes pertinentes
Les troubles cognitifs sont inhérents à l'autisme mais pas le retard ou le déficit. Le sacro-saint QI avec son repère à 70 est souvent impossible à établir ou alors, faussé. Répéter sans cesse que 10% des autistes sont des surdoués dotés de capacités exceptionnelles (oreille absolue, aptitudes à résoudre des calculs en un temps record) ou que 50% d'entre eux présenteraient un QI inférieur à 70 n'a aucune utilité concrète. Aujourd'hui, on préfère mesurer le niveau de développement socio-émotionnel et d'abstraction de la pensée, établir un profil sensoriel et chercher s'il y a déficit associé (et le mesurer). La déficience mentale provoque une évolution lente alors que l'autisme pur provoque un développement différent. Il faut comprendre quelle est la combinaison des deux pour chaque personne (savoir quelle est la part respective de traitement lent ou différent de l'information). Quand on sait que les comportements des personnes avec autisme répondent à leur compréhension du monde, on juge cette évaluation primordiale pour lutter contre ces comportements. Il y a des centaines de règles invisibles dans chaque moment social d'une journée. Par exemple, prenons le cas d'un enfant autiste placé au milieu d'un terrain de foot. S'il est submergé par ses perceptions sans aide possible venant de lui-même ou des autres, il demeure dans sa bulle ou s'enfuit en hurlant (autisme carapace). Si les autres joueurs simplifient et clarifient le jeu, si l'enfant n'est pas submergé par ses émotions, il tape dans le ballon (autisme passif). Si l'enfant est "doué" en imitation, il court derrière le ballon et shoot... mais ne comprend toujours rien aux règles du jeu (autisme actif). Ceci illustre une classification "facile" à utiliser, celle de Lorna Wing. Dans l'état actuel des connaissances scientifiques, le diagnostic moléculaire n'est pas possible.
Comment reconnaître une personne avec autisme ?
Les personnes autistes présentent des difficultés à réagir adéquatement en situation sociale : refus d'entrer en contact avec d'autres personnes ou, au contraire, monologues sans recherche d'interactions. Leur manière de parler est souvent rapide, avec des intonations illogiques et un timbre particulier. Elles comprennent de façon assez limitée le langage verbal et éprouvent des difficultés à parler de manière cohérente : elles peuvent alors rencontrer des problèmes de prononciation de certains mots, d'inversion des noms ou pronoms, d'expression des concepts abstraits ou encore d'écholalie (répéter les phrases de son interlocuteur). Si l'acquisition d'un certain niveau de production de la parole est plus tardive, une étude récente montre qu'à 8 ans, 70% des enfants autistes y parviennent, même lorsque le retard était important à 4 ans. Leur communication non verbale est également caractéristique : les gestes sont peu utilisés pour communiquer (pointer un objet du doigt... ). L'enfant sollicite rarement l'entourage. Il ne pratique pas l'imitation (il ne sait donc pas jouer). Les enfants autistes éprouvent des difficultés à décoder les émotions du visage comme la colère, la peur ou la joie. Ils ont des comportements répétitifs et manquent d'imagination dans les jeux : ils peuvent faire tourner un objet pendant très longtemps, focaliser sur une pièce du jeu, passer la main devant les yeux sur un rythme déterminé, se balancer... Il leur arrive aussi de se figer dans une posture étrange durant de longues minutes. C'est ce qu'on appelle des stéréotypies. L'autiste manifeste aussi peu d'intérêt pour les choses extérieures et a tendance à adopter des rituels en toute situation; si son environnement se modifie, il peut alors réagir de manière disproportionnée, très émotionnelle, avec beaucoup d'anxiété.
Le foot et la danse sont également des stéréotypies... mais elles sont acceptées par nous tous...
Le fonctionnement autistique
Le but d'une prise en charge ne peut être d'apprendre à faire semblant d'être "normal", mais de comprendre un fonctionnement différent. Il est absurde d'attendre d'une personne avec autisme qu'elle devienne notre miroir : "Fais comme moi, un visage souriant, maintenant tu es heureux !" (la résonnance émotionnelle). Ce qui est fondamentalement différent de notre fonctionnement neurotypique est ce qui déclenche l'émotion et la façon dont elle s'exprime. Le système de pensée chez une personne autiste est dominé par la perception et non par la conceptualisation, il y a impossibilité à vivre une émotion et à réfléchir en même temps, ainsi qu'une réelle difficulté à capter les informations abstraites, invisibles ou intemporelles.
Les personnes avec autisme ont une mémoire littérale, nous avons une mémoire sémantique (de la signification). Or, seule la signification permet de catégoriser, généraliser, imaginer, expérimenter, apprendre.
Les personnes avec autisme, surtout avec déficit cognitif associé, n'ont pas souvent-ou-peu de "langage interne" et sont donc victimes de dysfonctionnement exécutif (elles ne savent pas s'organiser pour pouvoir exécuter une tâche). Un bébé nait avec la capacité d'aller au-delà de l'information donnée en décodant déjà des choses abstraites ou codées; c'est un miracle dont nous devrions nous étonner ! C'est impossible pour la personne avec autisme qui dépend trop de ses perceptions : elle ne connaît pas ses émotions puisqu'elle ne les a jamais vues !
L'émotion dominante dans l'autisme est l'angoisse; les problèmes de comportements sont souvent liés au stress. Imaginons la solitude et la peur de vivre dans un monde inconnu, incompréhensible et douloureux.
Des pistes pour aller plus loin : ergothérapie, penser en images, émotion incarnée, théorie de l'esprit, cécité conceptuelle, cohérence centrale, dynamique de l'interaction, communication verbale, dysfonctionnements exécutifs, neurologie des émotions...
Quelles sont les causes de l'autisme ?
L'autisme est associé à des maladies génétiques (X fragile par exemple). Récemment, un lien a été établi avec la duplication du chromosome 15q, les gènes NHE6 et 9 ou CELF6. Certains évoquent une atteinte virale durant la toute petite enfance mais d'autres estiment qu'il faut un terrain génétique favorable pour que l'autisme se déclenche. Il est aussi question d'anomalies au niveau biochimique, en particulier les taux de sérotonine (trop élevés chez 30 à 40% des autistes) et de dopamine, impliquant un dérèglement des neurotransmetteurs. Ou encore de dysfonctionnement dans certaines zones du cerveau : gyrus fusiforme, cervelet atrophié,... Ces problèmes se dérouleraient tôt dans la formation du cerveau in utero. On parle ainsi d'une trop grande rigidité du fonctionnement du cerveau, vu qu'il ne s'adapte pas en fonction de l'environnement ou à cause du stress oxydatif.
Une étude vient aussi de constater que les enfants autistes présentent des taux de métaux toxiques plus importants dans le sang et les urines, comme le plomb, le thallium, l'étain et le tungstène. Le cadmium et le mercure seraient également en cause.
Tout celà confirme que l'autisme est un trouble particulièrement complexe et hétérogène... qui garde encore bien des secrets.
La croyance est encore tenace qui accuse la mère d'avoir un fonctionnement pathologique (à cause d'une dépression ou d'une difficulté d'attachement) avec son enfant, de l'avoir rejeté "inconsciemment", ce qui serait à l'origine du "blocage" du développement de l'enfant... Malgré les progrès scientifiques qui démentent, ces explications continuent à être relayées par certains, quitte à faire souffrir les parents inutilement...
Néanmoins, une étude récente constate une incidence de naissances d'enfants autistes plus élevée chez les femmes ayant subi un viol : un choc émotionnel fort peut perturber le système biologique de la future mère (comme le système immunitaire ou celui lié au stress).
Les pères ne sont pas en reste : une autre étude montre que les hommes ayant eu des enfants après 50 ans ont plus de risques d'avoir des petits-enfants autistes; une mutation, sautant une génération, dans les cellules du sperme pourrait être en cause...
On dénonce également les excès de vaccins trop tôt dans la vie du bébé. La substance en cause serait le thimérosal (ou mercure), les médecins sont aussi nombreux à confirmer qu'à refuter cette hypothèse, dans le doute, beaucoup se contentent de recommander d'éviter les vaccins contenant du mercure.
On ne guérit pas de l'autisme. Mais tout récemment, une chercheuse a constaté une amélioration du comportement de jeunes atteints du syndrome d'Asperger qui recevaient de l'ocytocine par voie nasale ou en prenant un diurétique... ces résultats sont à prendre avec beaucoup de précautions !!!
Côté prévention, la piste de la vitamine B9 a été ouverte : il semblerait qu'un complément pris 4 à 8 semaines après la date de conception réduirait de 40% le risque d'autisme du futur bébé... sans que l'on puisse trouver le lien...
D'autres cherchent à restaurer la communication entre les cellules du cerveau et obtiennent des résultats encourageants chez la souris mais il reste beaucoup de chemin avant d'arriver à l'être humain !
Humilité, respect, tact et bon sens : Les accompagnements.
La condition de l'efficacité réside dans la continuité horizontale (entre les intervenants) et verticale (dans le temps).
La personne ou l'équipe qui prend en charge une personne autiste peut être la meilleure chose qui lui arrive... ou la pire ! Si on ne comprend pas le fonctionnemnt de la personne autiste, si on n'évalue pas régulièrement son niveau de compréhension du monde, si on ne connaît pas son profil sensoriel, on ne peut lui offrir l'aide appropriée (des questions demeurent permanentes : Que cherche-t-il à obtenir ou à éviter par son comportement ? Suis-je sûr qu'il a bien compris ce que je lui demande et qu'il peut le faire ?).
1 - Quelques préceptes de base :
- Il ne peut y avoir aucune prise en charge sans valeur éthique.
- Il y a plus de variations entre les autistes qu'entre les "neurotypiques" que nous sommes.
- Les professionnels ne doivent jamais négliger l'"expertise life" des parents.
- Les parents, censés pouvoir choisir le lieu et la prise en charge, doivent avoir la possibilité de se poser la question : "Dans quel endroit mon enfant sera-t-il le mieux protégé avec des gens capables de l'adapter ?"
- Le médicament est une aide, jamais une solution.
- Il faut préserver la motivation, l'intention et la confiance en proposant à la personne autiste des renforcements positifs à ses comportements positifs, se méfier des méthodes et des programmes, préférer les approches et toujours travailler en situation.
- La relation famille/professionnels est la principale instance de la vie inclusive des autistes.
- Il faut respecter et canaliser les comportements fonctionnels (quand ils ne sont pas dangereux comme l'auto-mutilation). Les stéréotypies, les comportements répétitifs, les rituels compulsifs protègent du surpoids de stimulation sensorielle ou sociale; ce sont des compensations émotionnelles vitales, des consolations, des créateurs de prévisibilité apaisante. Ils ont un effet anesthésique, il ne faut pas les supprimer de force sans rien offrir en échange (trouver des stimuli externes). Il ne faut pas les laisser devenir trop envahissants car ils deviennent alors nocifs pour le système nerveux. La musique est un apaisement autarcique créant une sensation enveloppante protectrice que nous connaissons tous bien...
2 - Actuellement, le traitement repose sur la stimulation dans les interventions éducatives.
Celles-ci favorisent l'acquisition de capacités cognitives, fonctionnelles ainsi que de mémorisation (communication, autonomie, imitation). par exemple, TEACH (Treatment and Education of Autistic and related Communication Handicaped children), TED ( Thérapeutique d'Echange et de Développement), Floor-Time Approach, ABA (Applied Behavior Analysis), Méthode des 3 I.
Les animaux ou la musique voire certaines machines, des robots ou des tablettes tactiles peuvent être de bons vecteurs pour favoriser les échanges.
3 - L'adaptation de l'environnement, le pré-éducatif.
Au quotidien, ce qui gêne le plus les personnes autistes, ce sont leurs problèmes sensoriels (le plus dur n'est pas de ne pas comprendre le monde mais de ne pas pouvoir le supporter). En leur fournissant des repères dans le chaos, on leur évite de s'épuiser à les trouver seuls et de n'être pas disponibles pour apprendre. Il vaut mieux commencer par retirer d'office les choix superficiels, les détails, les invasions sensorielles avant d'utiliser des stratégies éducatives. Si les intervenants s'organisent, structurent, clarifient l'environnement et leurs attentes, ils sont dans la pro-action, évitant ainsi de se faire assaillir par les comportements indésirables et problèmatiques de la personne autiste (les punitions, les cris sont des réactions reçues comme des renforcements... !)
Sources : Carine Maillard, Théo Peeters, Temple Grandin, Antoine...